Le coupable et le gardien de la loi

Il est 7h du matin. J’entre dans un grand hôpital de Québec. Cela faisait longtemps que je n’y étais pas allée, du temps de la pandémie, en fait.

A l’entrée, rien n’a changé : bidon de désinfectant avec son grand panneau ordonnant de se désinfecter les mains puis passage devant la dame masquée derrière une grande vitre qui m’a tendu un masque avec sa pince en m’ordonnant de me re-désinfecter les mains au bidon suivant.

Je mets le masque et vais au bureau d’informations pour demander mon chemin.

Je suis seule dans une grande salle d’attente pas loin des ascenseurs. Je dois passer une radiographie. Je suis la première de la journée.

Assise dans le coin de la salle, loin du passage des gens qui prennent l’ascenseur, je m’occupe sur mon téléphone quand une dame arrivée de nulle part, masquée, m’invective de l’autre bout de la salle car j’ai descendu mon masque sous le menton. Je suis seule et elle est à plus de 5-6 mètres de moi.

– Vous DEVEZ mettre votre masque, Madame ! C’est obligatoire à l’hôpital ! me répète-t-elle plusieurs fois.

Si elle me l’avait demandé gentiment, je l’aurais probablement mis mais j’ai un problème avec l’autorité, je l’avoue. Je n’ai pas accédé à sa demande même si cela ne me coûtait rien de le faire et que ça lui aurai juste fait plaisir de savoir qu’elle avait été une bonne citoyenne qui fait respecter la loi.

Au feeling, je sens que si je commence à lui expliquer que la loi dit aussi qu’on n’a pas besoin de le mettre quand on est à plus de deux mètres des gens, elle va argumenter et ça n’en finira pas, ce dont je n’ai pas du tout envie. Je décide donc de revenir à mon téléphone en hochant OUI de la tête. Elle répète encore une fois avant de réaliser que je ne répondrais pas.

Elle finit par prendre l’ascenseur. Je me suis alors demandée si elle oserait….

Délation

Elle a osé ! Cinq minutes pour tard, un gardien de sécurité sort de l’ascenseur et s’approche de moi. Je mets mon masque tout de suite puisqu’il s’approche de moi et sera à moins de deux mètres de moi.

– Bonjour Madame, me dit-il.
– Bonjour Monsieur, je réponds.

Je vois bien qu’il vient me faire la leçon mais 1. je viens de mettre mon masque; 2. son talkie-walkie commence alors à lui parler et il doit faire répéter avant de répondre et, 3. on m’appelle pour faire mon examen. Je m’éclipse par les grandes portes qui viennent de s’ouvrir devant moi, m’évitant la discussion désagréable qui aurait pu s’ensuivre.

Délation. C’est ce que la dame était allée faire au bureau de la sécurité. C’est ce que font les gens qui veulent tout contrôler mais n’y arrivent pas : ils se servent des autres pour arriver à leurs fins. C’est triste et mesquin et je ne vis tellement pas dans ce genre de monde que cela me surprend toujours.

J’aurais pu mettre le masque et clore la discussion avec elle, c’est vrai, mais j’avais clairement l’intuition qu’elle aurait de toute façon continué à m’obstiner et que j’aurais fini par peut-être être désagréable avec elle, ce que je ne voulais pas.

Dans un sens comme dans l’autre, que je le mette ou pas, elle voulait faire respecter la loi – et c’est tout à son honneur -, mais il y a des façons de le faire et, avec moi, cela n’a pas passé. Il faut dire que j’ai été à bonne «école» à grandir dans une famille hyper stricte doublée de violence. Douce et pacifique – mais ferme et parfois dure -, je ne me laisse pas facilement imposer des choses auxquelles je n’adhère pas.

Action – réaction

J’ai bien vu tout mon processus de réaction tout au long de ces quelques minutes entre le moment où la dame a commencé à m’ordonner de mettre le masque jusqu’à l’ouverture des portes de la salle d’examen.

La dame a voulu me poser en coupable et elle en gardienne de la loi. Je ne me sentais cependant pas (totalement) coupable et je suis restée clairement et consciemment en accord avec moi-même tout au long du processus.

J’avais quand même un petit % de doute sur ce que je faisais car je reviens d’une longue vie à me sentir coupable de tout et j’ai parfois de la peine à me positionner clairement dans mes croyances (hé oui, je suis humaine comme vous !). Il me reste encore quelques relents de cet enjeu qui fait que je pourrais attirer des situations désagréables comme celle-ci. C’est pour ça que j’ai vu le gardien de sécurité arriver… mais il a été appelé et s’est éloigné.

Si j’avais été à 100% sûre de ce que je faisais, je suis sûre personne ne m’aurait rien dit. Je n’aurais pas attiré cette situation où j’ai eu à voir et sentir jusqu’à quel point je me sentais coupable d’avoir gardé mon masque sous le menton plutôt que sur le visage.

Choisir de se sentir coupable ou pas

La vie nous apporte toujours des situations qui nous permettent de voir jusqu’à quel point on a guéri nos enjeux.

Je n’ai finalement pas eu à argumenter avec le gardien de sécurité. Je n’ai pas attiré que la situation vienne me confirmer que j’étais coupable. J’étais juste pacifique. Je ne faisais de mal à personne et je n’ai dérangé que cette dame qui avait besoin de contrôler une personne qui n’aime pas se faire contrôler.

En fait, la dame voulait se faire respecter dans ses croyances – la «loi» – et moi dans les miennes. Par mon silence et mon indifférence, elle s’est sentie non respectée, tout comme moi je ne me sentais pas respectée par son attitude mais je ne voulais pas en faire un plat. Ça n’aurait fait qu’envenimer les choses et je n’avais pas encore pris mon petit déjeuner. Ce n’était pas le temps pour une prise de bec même en douceur.

Ma jeunesse dans la violence m’a appris que le silence peut être une arme redoutable, bien plus efficace que de réagir, discuter, argumenter jusqu’au point où, parfois, la violence prend place.

La ligne est fine entre respecter et se sentir respecté. Quand l’autre pense à l’opposé de ce qu’on croit, on se retrouve dans un espace de ping-pong où les deux ont tort et raison, suivant de quel côté on se place.

C’est pourquoi il est important de voir et sentir où et comment on se positionne intérieurement. Cela se passe en une fraction de seconde. Le temps de remettre le masque pour respecter la distanciation de deux mètres avec l’agent de sécurité qui arrivait vers moi et arrêter totalement de me sentir coupable. Alors, les portes vers un autre ailleurs se sont ouvertes comme par magie.

– Bonjour Madame, vous allez bien ce matin ?! me demande, souriante derrière son masque, la technicienne de l’autre côté des portes.

Ma journée commence bien.

Une fois sortie de l’hôpital, je marche pour aller au travail avec le soleil qui se lève. La lumière est douce. Les arbres enneigés créent un décor spécial sous le ciel bleu que les nuages laissent apparaître tranquillement (photo ci-haut qui ne montre pas toute la belle énergie malheureusement).

Je suis bien, contente de ce que je vis et je remercie la Vie pour tout le bien que je me fais, que j’attire et crée.

Plus je vais bien, plus je peux rayonner le bien et c’est ce que je veux toujours.

Je vous souhaite de toujours prendre conscience de ce que l’autre personne déclenche en vous de désagréable, à quoi cela vous ramène et quel enjeu est touché afin de pouvoir en prendre soin, le guérir et vous permettre ainsi d’être plus heureux/se.

De tout coeur

Dominique

© Texte et photos Dominique Jeanneret – Vous pouvez reproduire ce texte dans votre site ou blog non-commercial à condition de ne rien y changer, de laisser ces dernières lignes et le lien vers ce blog par respect pour l’auteure, que vous le preniez en entier ou juste un bout. Merci !

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